Expertise automobile : les formes et les missions

Atlas magazine propose à ses lecteurs un dossier spécial consacré à l’expertise automobile qu’il publie en deux parties. Dans ce numéro nous présentons le métier d’expert, ses diverses missions et les différentes formes d’expertise.
accident de la route© Shuets Udono, CC BY-SA 2.0

La deuxième partie qui sera publiée en juin, se penchera sur le statut de l’expert et l’évolution de la profession.
L’approche du risque est essentielle pour une compagnie d’assurance dont la finalité est de constituer un portefeuille homogène. C’est dans ce but que l’assureur s’entoure de spécialistes qui lui permettent de gérer les risques non seulement lors de la souscription mais également lors de la survenance d’un sinistre.

Dans les branches non vie, l’assureur délègue une partie de ses pouvoirs de contrôle à des experts chargés le plus souvent d’une mission d’évaluation des dommages après sinistre. En réalité la mission de l’expert automobile est beaucoup plus large que ce simple constat.

De nos jours, l’expert automobile assure des missions d’évaluation des dommages après sinistre et de sécurité publique. A ces deux rôles s’ajoute un troisième à savoir l’évaluation des risques avant leur acceptation par l’assureur.

Expertise automobile, présentation de la discipline

L’expertise automobile est une discipline technique relativement récente. Ses débuts remontent aux années 1930. Son développement est étroitement lié à celui de l’automobile dans les pays industrialisés. Au fil des années, l’activité s’est professionnalisée surtout après l’obligation d’assurance responsabilité civile imposée aux propriétaires de véhicules terrestres à moteur. C’est une activité réglementée, exercée par des personnes physiques ou morales indépendantes, soumises à des obligations.

Définition

Il n’existe pas de définition précise et unique de l’expertise automobile. Ses contours sont fonction des besoins exprimés par les assureurs et des missions qui lui sont confiées: expertise avant sinistre, expertise après sinistre, expertise de véhicule de collection, expertise judiciaire, expertise et sécurité routière, etc.

expertise automobileExpertise avant sinistre © Wheelhouse1, CC BY-SA 3.0

Lors de ses interventions les plus sollicitées c'est-à-dire celles après la survenance d’un sinistre, l’expert automobile a pour rôle de déterminer les causes du sinistre et évaluer le coût de réparation des dommages.

Enfin dans de nombreux pays, l’expert automobile intervient également hors assurance. Le législateur lui confie une mission de sécurité routière et il coopère de façon de plus en plus active au service public de la justice.

L’expertise automobile dans le cadre de l’assurance

Dans son rôle traditionnel, l’expert automobile est systématiquement requis lors de la survenance d’un sinistre automobile. Il peut toutefois intervenir lors de la souscription d’un contrat d’assurance.

L’expertise automobile lors de la souscription d’un contrat d’assurance

L’expert joue un rôle fondamental dans la prise en charge de certains risques automobile par l’assureur. C’est en fonction des détails fournis par l’expert que l’assureur détermine le montant de la prime :

  • des véhicules de collection,
  • des véhicules spécifiques,
  • des véhicules routiers lourds,
  • des matériels de chantier et de travaux spécialisés appelés à circuler sur la voie publique.

A la demande de l’assureur ou d’un particulier, l’expert peut être amené à rechercher les vices cachés d’un véhicule. Il peut également intervenir en qualité d’assistant technique lors de l’achat d’un véhicule d’occasion.

Les missions de l’expert après la survenance d’un sinistre

Selon le droit des assurances, le recours à l’expertise ne constitue pas une obligation imposée à l’assureur. En assurance de dommages, ce même droit consacre le principe du paiement de gré à gré.

Toutefois, dans les cas complexes ou lorsque l’évaluation des dommages nécessite des connaissances techniques particulières ou pour éviter toute contestation, les assureurs ont généralement recours à l’expertise. Dans la pratique, les cas simples peuvent être réglés selon le principe du gré à gré et les cas complexes sur la base d’une expertise.

Expertise automobile : Les missions traditionnelles

Après la survenance d’un sinistre, la mission première de l’expert est d’évaluer les dommages et de chiffrer les coûts de réparation du véhicule accidenté.

Dans la pratique, l’expert est mandaté par la compagnie d’assurance. Sa mission comprend une succession d’actes qui aboutissent à la rédaction d’un rapport d’expertise automobile :

  • Identification du véhicule,
  • Identification des responsabilités,
  • Choix de la méthode de réparation,
  • Détermination de la valeur du véhicule,
  • Chiffrage des frais de remise en état,
  • Suivi de la réparation des dommages,
  • Analyse des coûts et factures.

Identification du véhicule

Après réception de l’ordre de mission de l’assureur, de la justice ou de l’administration, l’expert doit identifier tout ou partie du véhicule accidenté. Cette identification nécessite le recours à des documents administratifs tels que carte ou certificat d’immatriculation, avis de retrait, certificat de vente, etc. L’expert peut, si nécessaire, avoir recours à des descriptifs techniques, aux fichiers d’immatriculation ou autres bases de données.

Il doit ensuite consigner le numéro d’immatriculation, le numéro de série du véhicule et le numéro de la plaque constructeur. Il atteste de l’identification du véhicule en rapprochant les numéros relevés avec les références fournies par les documents administratifs mentionnés dans l’ordre de mission. Cette tâche est menée en relation avec l’assureur, le souscripteur, l’administration et parfois le constructeur du véhicule.

Identification des responsabilités

Lorsqu’un véhicule est endommagé et/ou accidenté, l'expert constate et analyse les dommages. Comprendre les causes du sinistre s’avère essentiel. Pour y parvenir, la déclaration et/ ou le constat amiable, la documentation du constructeur ou l'historique du véhicule sont indispensables. En relation avec le dépositaire du véhicule, l’assureur, le dépanneur, le propriétaire et les pouvoirs publics, l’expert doit procéder à un rapprochement entre les dommages constatés et les dommages déclarés.

Choix de la méthode de réparation

Selon le principe indemnitaire régissant l’assurance de dommages, le véhicule accidenté doit être remis dans la situation dans laquelle il se trouvait au moment de la survenance du sinistre. L'expert va donc déterminer la méthode de remise en état la plus appropriée pour y parvenir. Cette démarche suppose la prise en compte des recommandations des constructeurs et équipementiers, des normes de sécurité et des moyens techniques à la disposition du garagiste effectuant les réparations.

Détermination de la valeur du véhicule

L’expert peut être amené à déterminer la valeur de remplacement du véhicule accidenté. Cette valeur tient compte du taux de dépréciation du véhicule et du marché de l'occasion. Pour les cas complexes, l’expert dispose de revues et sites spécialisés à partir desquels il peut baser son évaluation.

Véhicule volé

Lorsque l’examen du véhicule est impossible, véhicule volé ou totalement incendié, l’expert détermine la valeur du bien assuré à partir d’un ensemble d’indices : cotation du véhicule dans les revues spécialisées, valeur d’un véhicule identique sur le marché de l’occasion, conclusions du dernier rapport technique, réparations précédemment effectuées sur le véhicule, etc.

Chiffrage des frais de remise en état

expertise autoAprès avoir préconisé la méthode de réparation adéquate, l’expert peut procéder à des contrôles supplémentaires ou essais sur les parties du véhicule à réparer ou à remplacer.
La détermination des frais de réparation s'appuie sur les tarifs des pièces détachées, le coût de la main d'œuvre, les tests éventuellement effectués, les frais de peinture, etc.
Les aspects économiques et techniques liés à la sécurité pèsent sur la décision de l’expert. Ce dernier peut décider soit la réparation du véhicule soit sa mise au rebut.

Suivi de la réparation des dommages

Les dommages évalués et la valeur du véhicule établie, l'expert a une mission de suivi des réparations. Il s’assure que les procédures appliquées respectent le cahier des charges préétabli.

Analyse des coûts et factures

De par sa formation, l’expert est en mesure de comprendre et vérifier les factures de réparation des véhicules. Il s’assure que les prix appliqués correspondent à ses propres estimations. Les écarts constatés doivent être justifiés.

Les sociétés d’assurance ont systématiquement recours à l’expertise pour les cas les plus compliqués. C’est alors à l’expert de quantifier les dommages et le temps nécessaire à la remise en état du véhicule.

Les différentes formes d’expertise automobile

Dans de nombreux pays, le recours à l’expertise automobile est régi par des conventions inter-compagnies. Ces conventions passées entre les assureurs d’un même marché peuvent s’appliquer à des garanties spécifiques. Elles peuvent également être différenciées en fonction du montant des dommages. Il existe ainsi des conventions d’expertise qui s’appliquent uniquement à la garantie responsabilité civile obligatoire alors que d’autres se rapportent à la garantie dommages au véhicule. Enfin une convention d’expertise peut se limiter aux sinistres qui ne dépassent pas un certain montant.

L’expertise automobile diligentée par l’assureur

En droit commun, l’expert automobile est saisi par l’assureur après un premier examen de la déclaration de sinistre reçue de l’assuré. L’expert agréé par la profession et/ou les tribunaux est choisi sur une liste nationale.
Lorsqu’elles existent, les conventions fixent les modalités de désignation de l’expert.

Expertise automobile amiable et contradictoire (l’expert désigné par l’assuré)

Lorsqu’aucun accord de gré à gré n’est conclu entre l’assureur et l’assuré ou lorsque ce dernier conteste ou refuse les conclusions de l’expert mandaté par l’assureur, il est libre alors de désigner son propre expert. Cette contre-expertise est à la charge de l’assuré.
Le second expert doit se rapprocher de celui désigné par l’assureur pour confronter ses idées et aboutir à la rédaction d’un rapport commun. Cette procédure est désignée sous le nom d’expertise amiable et contradictoire. Lorsque les deux experts sont d’accord, la procédure cesse.

La tierce expertise

Lorsque les deux experts ne parviennent pas à un accord, ils peuvent désigner un troisième expert pour procéder à une tierce expertise.

accident voiture © Sonia Sevilla, CC0 1.0

Le recours à la tierce expertise doit être mentionné dans le contrat d’assurance. Cette clause contractuelle est souvent dénoncée par les juges qui la considèrent comme abusive, l’assureur pouvant être tenté de prolonger la procédure inutilement.

Le tiers expert peut être nommé par voie amiable ou à défaut désigné par le tribunal.
Chaque partie paie son propre arbitre. Les frais du troisième arbitre étant répartis à part égale entre l’assureur et l’assuré.

L’expertise judiciaire

En cas d’échec de l’expertise amiable et contradictoire et de la tierce expertise, chaque partie peut demander au tribunal une expertise judiciaire. C’est alors le président du tribunal qui nomme l’expert judiciaire dont les conclusions serviront au magistrat pour trancher le litige. L’expertise judiciaire est une procédure longue et coûteuse.

L’expertise automobile dans le cadre de la sécurité publique

Les autorités font de plus en plus appel aux connaissances de l’expert automobile pour réduire le nombre des accidents de la route.

Les données collectées par les experts automobile sont centralisées dans des bases de données. C’est ainsi que les accidents provoqués par les problèmes de tenue de route ou par des véhicules endommagés ont incité certains pays à introduire un contrôle technique obligatoire des véhicules. Certaines législations ont complété cette mesure par des procédures particulières pour les véhicules gravement endommagés.

Les véhicules gravement accidentés

accident neige© Oregon Department of Transportation, CC BY 2.0

L’expert automobile est chargé d’empêcher un véhicule, ayant subi des dommages importants d’utiliser, sans contrôle préalable, la voie publique. La remise en circulation d’un tel véhicule n’est possible qu’après la délivrance d’un rapport de conformité attestant qu’il répond aux normes de sécurité requises.

En droit français, l’expert qualifié pour cette mission est théoriquement désigné par l’assuré. Il est choisi sur une liste spécifique. En fait, il est nommé par l’assureur après consultation de son client. C’est un expert unique chargé de rendre un rapport sous l’angle sécuritaire. Il doit uniquement se prononcer sur la possibilité de réparer totalement le véhicule et, si réparation il y a, de décider si ce véhicule est apte à circuler sur la voie publique.

Les véhicules économiquement irréparables

Un véhicule est considéré comme économiquement irréparable, lorsque l’expert désigné par l’assureur constate que le montant des réparations est supérieur à sa valeur. Confronté à une telle situation, l’assureur peut faire une proposition d’indemnisation à l’assuré qui peut également conserver son bien. Dans ce cas, Il est fait opposition à tout transfert de la carte d’immatriculation. Pour lever cette opposition, l’assuré doit fournir un rapport d’expertise attestant que le véhicule a été réparé dans le respect des règles de sécurité et qu’il est apte à circuler sur la voie publique.

Le rapport d’expertise automobile

L’expert mandaté par l’assureur doit impérativement remettre son rapport dans les délais requis.

Le rapport d’expertise doit obligatoirement fournir des informations de nature à renseigner l’assureur. Il comporte :

  • le nom de l’expert,
  • le nom et la qualité des personnes présentes lors de l’examen du véhicule,
  • le lieu de l’expertise,
  • la date de l’expertise,
  • les éléments d’identification du sinistre,
  • les caractéristiques du véhicule expertisé,
  • l’état général du véhicule,
  • l’usure des pneumatiques en pourcentage,
  • le moment où le véhicule a été expertisé: avant, pendant ou après les réparations,
  • la valeur du véhicule: valeur à neuf (cas des véhicules assurés en dommages), valeur vénale, valeur de remplacement à dire d’expert, lorsque le montant des travaux est équivalent au prix du véhicule,
  • l’évaluation de la remise en état,
  • les opérations d’expertise: points de choc, détails et coûts des fournitures, coûts de la main d’œuvre, taux de vétusté, durée de la réparation,
  • les photographies faisant apparaître les points de choc,
  • les conclusions de l’expert.

Une copie du rapport d’expertise est adressée au mandant, en principe la société d’assurance. Selon les législations, une copie est également adressée à l’assuré.

Dans le cadre des conventions d’expertise, les assureurs s’engagent à ne pas contester l’évaluation des dommages déterminés par l’expert unique lorsque le montant des travaux ne dépasse pas une certaine somme.

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