Ebola, les assureurs sur le qui-vive

Selon le dernier bilan de l’Organisation Mondiale de la Santé, le virus Ebola qui sévit actuellement en Afrique occidentale a contaminé, de mars 2014 à fin novembre 2014, 16 899 individus. Près d’un tiers d’entre eux, soit 6 046 personnes, a succombé à la maladie.

Les prévisions de l’OMS sont loin d’être rassurantes. Malgré quelques notes d’espoir, comme la mise au point imminente d’un vaccin, l’épidémie continue de progresser.

Toujours selon l’OMS, jamais auparavant une maladie n’a fait autant de victimes et n’a été si étendue. Dès décembre 2014, Ebola pourrait infecter jusqu’à 10 000 nouvelles personnes par semaine en Afrique occidentale.

Contrôle médical © CDC Global, CC BY 2.0

Durant les premières semaines de l’épidémie, le taux de mortalité de la maladie a atteint 70% des personnes infectées. La Guinée, la Sierra Leone, le Libéria et dernièrement le Mali sont les pays les plus touchés par la catastrophe. Six cas suspects ont été signalés en Espagne et neuf contaminations par le virus ont été détectées sur le territoire américain. Dans ce dernier pays, le décès de deux personnes des suites d’Ebola a ravivé les inquiétudes sur une éventuelle propagation de la maladie dans les pays occidentaux.

Chronologie des décès par pays
Dommages en milliards USD
Date des bilans de l’OMSGuinéeSierra LeoneLiberiaNigeriaMaliR.D. du CongoTotal
01/03/2014
290000029
01/04/2014
830000083
01/05/2014
14900000149
01/06/2014
208611000225
01/07/2014
30510175000481
01/08/2014
358273225100857
01/09/2014
4944768717001 848
01/10/2014
7396282 0698003 444
14/10/2014
8431 1832 4588004 492
19/11/2014
1 1921 2502 9648505 419
26/11/2014
1 2601 3983 0168605 688
28/11/2014
1 3121 5303 14586456 046
Source: OMS

Dans un article récent, le microbiologiste Jean-Pierre Dedet, auteur de « Epidémies, de la peste noire à la grippe A/H1N1 », écarte l’éventualité de la propagation de la maladie sur les continents européen et américain. Certes, il y aura quelques cas d’infection, mais ils seront rapidement détectés puis mis à l’écart. L’épidémie restera concentrée sur l’Afrique, notamment dans les pays les plus défavorisés. Les pays exposés au virus présentent un système de santé fragile, avec un niveau de pauvreté élevé et une consommation traditionnelle de viande de brousse crue, vecteur de propagation du parasite.

Pour rappel, Ebola dénommée également fièvre hémorragique est apparue pour la première fois en 1976 dans des villages isolés du Soudan et du Congo. Le nombre de décès n’a pas alors dépassé les 431 cas.

La source de la maladie reste mal définie. Certaines études ont toutefois démontré que les chauves-souris et certaines espèces de singes pourraient être des porteurs sains du virus. Le germe de la maladie se transmet à l’homme par le contact direct avec l’animal ou par la consommation de sa viande. Il se propage ensuite par contact humain.

Il n’existe actuellement aucun vaccin contre cette maladie mortelle. Plusieurs traitements sont néanmoins en cours d’évaluation.

Pandémie

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, une pandémie est une flambée de maladie infectieuse et contagieuse qui réunit trois principaux critères. La maladie:

  • est causée par un nouveau virus ou un virus qui ne s’est pas manifesté depuis longtemps,
  • se caractérise par une morbidité et une mortalité élevées,
  • se propage facilement et touche une partie importante de la population dans une zone géographique très étendue.
Chronologie des précédentes flambées de maladie à virus Ebola
AnnéePaysNombre de casNombre de décèsTaux de mortalité
2012
R. D. du Congo572951%
2012
Ouganda7457%
2012
Ouganda241771%
2011
Ouganda11100%
2008
R. D. du Congo321444%
2007
Ouganda1493725%
2007
R. D. du Congo26418771%
2005
Congo121083%
2004
Soudan17741%
2003 (de novembre à décembre)
Congo352983%
2003 (de janvier à avril)
Congo14312890%
2001-2002
Congo594475%
2001-2002
Gabon655382%
2000
Ouganda42522453%
1996
Afrique du Sud11100%
1996 (de juillet à décembre)
Gabon604575%
1996 (de janvier à avril)
Gabon312168%
1995
R. D. du Congo31525481%
1994
Côte d’Ivoire100%
1994
Gabon523160%
1979
Soudan342265%
1977
R. D. du Congo11100%
1976
Soudan28415153%
1976
R. D. du Congo31828088%
Source: World Health Organization www.who.int

Couverture du risque de pandémie

La pandémie est un risque de masse, classé parmi les catastrophes incontrôlables. Sa portée peut être géographiquement étendue. La catastrophe peut avoir ainsi des répercussions significatives sur l’économie et plus particulièrement sur l’assurance. Selon les spécialistes, des pics de sinistralité pourraient occasionner des difficultés financières et affecter la rentabilité de certains marchés d’assurance si le virus sortait des pays où il sévit actuellement.

Impact d’Ebola sur l’assurance

En Afrique

En Afrique, plus de 90% de la population active ne disposent pas de couverture assurantielle. De plus le taux de pénétration de l’assurance de personnes est faible. En 2013, ce taux était de 0,3% en Afrique sub-saharienne et de 0,5% pour l’ensemble de la zone CIMA. Dans les pays où Ebola sévit le plus c’est-à-dire la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone, ce taux de pénétration est au-dessous de 0,3%. Les conséquences de la propagation d’Ebola sur le continent seraient donc minimes pour les sociétés d’assurance.

Au pire des cas, les gouvernements des pays affectés prendront en charge les malades et feront face aux divers préjudices.

Hors Afrique

La violente apparition du virus Ebola a mis les professionnels du secteur de l’assurance sur le qui-vive. Ces derniers anticipent les scénarios les plus pessimistes, en cas de propagation de la maladie dans des pays à fort taux de pénétration de l’assurance.

Toutefois, les spécialistes considèrent que les assureurs des pays économiquement avancés ne seront pas significativement impactés. Seuls ceux des pays à niveau économique faible ou intermédiaire pourraient souffrir d’une telle pandémie.

Selon les estimations de l’Insurance Information Institute (III), près de deux millions de déclarations de sinistres décès sont présentées chaque année par les ayants droit aux Etats-Unis. En cas de propagation de l’épidémie dans ce pays, le nombre de décès pourrait augmenter de 100 000 unités par an. La sinistralité des assureurs vie va ainsi s’accroître de près de 5%. L’III juge cette hausse de la mortalité raisonnable. Elle ne pourra en aucun cas mettre en péril la solvabilité des assureurs américains.

Impact économique

Une catastrophe d’une telle ampleur pourrait affecter non seulement les économies des pays touchés par l’épidémie, mais également celles des pays voisins. Selon la Banque Mondiale, le préjudice pourrait s’élever alors à 32,6 milliards USD d’ici la fin 2015, si le virus se propageait au-delà de la Guinée, du Liberia et de la Sierra Leone. Toujours selon la Banque Mondiale, le coût total de l’épidémie pour les finances publiques des trois pays sérieusement affectés atteint déjà les 500 millions USD.

Ces dégâts sont dus, entre autres, à:

  • la baisse de croissance du PIB qui perd 2,1 points en Guinée, 3,4 points au Liberia et 3,3 points en Sierra Leone. Ces pertes de croissance cumulées s’élèveraient à 359 millions USD en 2014,
  • la paralysie de l’activité économique avec les risques de fermeture d’entreprises ou d’altération des marchandises au niveau de l’Afrique de l’Ouest,
  • la perte d’exploitation,
  • la fermeture des frontières avec les pays voisins, ce qui perturberait les échanges commerciaux,
  • le risque d’une crise alimentaire,
  • la diminution de l’activité touristique,
  • l’absentéisme au travail,
  • le coût lié au traitement des patients : isolement des malades, soins, vaccins, etc.,
  • le recul des investissements dans la région.
La violente apparition du virus Ebola a mis les professionnels du secteur de l’assurance sur le qui-vive. Ces derniers anticipent les scénarios les plus pessimistes, en cas de propagation de la maladie dans des pays à fort taux de pénétration de l’assurance.
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