La fraude à l'assurance

Aussi ancienne que la profession, la fraude à l'assurance a pris de l'ampleur vers le milieu des années 1980 du fait, notamment, de l'augmentation croissante des primes. Les tentatives et pratiques frauduleuses sont diverses dans leurs formes et leurs degrés de gravité. Elles touchent toutes les branches, interviennent à tous les niveaux de la transaction et peuvent être le fait de différentes parties: assurés, souscripteurs, professionnels, tiers et même assureurs et réassureurs.

Confrontées à un phénomène qualifié de crime qui grève lourdement l'activité, les compagnies ont commencé à réagir de manière appropriée pour prévenir, détecter et éradiquer la fraude à l’assurance afin de protéger leurs intérêts et ceux des assurés.

Pour la profession, l'objectif est de maintenir un équilibre entre les enquêtes fastidieuses pour déterminer la fraude et les dédommagements légitimes des assurés.

Ce sont les compagnies d'assurance, les titulaires de police, les contribuables et le public en général qui paient la facture de la fraude en voyant leurs primes et leurs taxes augmenter.

Dans quel cas parle-t-on de fraude à l’assurance ?

La fraude à l'assurance se caractérise par de fausses déclarations ou des omissions intentionnelles en vue de bénéficier illégalement de prestations d'assurance.

fraude assuranceDans la pratique, la fraude peut revêtir différentes formes: surfacturation, falsification ou modification de reçus, falsification des documents établissant un diagnostic médical ou un sinistre ou soumission de demandes de règlement pour des produits ou des services non nécessaires ou qui n'ont pas été reçus.

Particulièrement affectée par le phénomène, l'assurance maladie où les fraudes portent sur des fausses factures et des procédures, la falsification d'identité des bénéficiaires, la surfacturation des consultations ou des actes médicaux, la fausse codification des produits pharmaceutiques, la simulation d'incapacité physique, des pratiques et demandes de règlement inappropriées ou frauduleuses.

Le palmarès des fraudes à l’assurance les plus spectaculaires et les plus coûteuses publié chaque année par la profession révèle le caractère parfois cocasse des méthodes mises en œuvre en matière d'escroqueries à l'assurance.

Le besoin créant la fonction, les compagnies ont développé, à leur tour, des moyens et des métiers spécifiques de lutte. Véritables limiers, les enquêteurs investissent le terrain pour déjouer les multiples stratagèmes, confronter les témoignages et confondre les criminels. C'est ainsi que les romans et films policiers ont fait leurs sujets de prédilection des différentes affaires de fraude : meurtres pour bénéficier de l'assurance vie, disparition simulée, sabordage de navires, vols ou destruction volontaire de biens en vue d'obtenir dédommagement du préjudice réel ou simulé.

Fraude à l’assurance : l’ampleur du phénomène

En raison de sa nature opaque et illicite, la fraude à l'assurance ne fait pas l'objet d'études quantitatives ou de statistiques permettant de mesurer, avec précision l'ampleur du phénomène. De même, les auteurs du délit sont difficiles à identifier. Toutefois, les compagnies européennes estiment qu'environ 10% des indemnités qu'elles versent pour des sinistres le sont pour des cas frauduleux, ce qui représente un important préjudice qu'amplifie la lutte antifraude : le coût, la complexité et la durée des enquêtes contribuant à la hausse des pertes.

Dans les régions Afrique, Maghreb et certains pays du Moyen Orient, la fraude à l'assurance est une pratique courante qui a l'ampleur d'un véritable fléau. Toutes les branches sont affectées : transport, automobile, maladie. L'absence de moyens de contrôle, le vide juridique et la collusion entre compagnies et assurés constituent un terreau fertile pour le phénomène.

La fraude à l’assurance par les chiffres

  • On calcule que la fraude à l'assurance IARD coûte aux canadiens 1,3 milliard USD chaque année. Selon les assureurs IARD, 10 à 15% des réclamations d'assurance IARD sont frauduleuses.
  • Au Royaume Uni, une étude récente évalue le montant de la fraude à 550 millions GBP par an, ajoutant que les compagnies d'assurance s'avèrent autant victimes qu'auteurs de délits. Une grande compagnie sur trois fournit de fausses informations sur ses formulaires. Au cours des deux dernières années, 2/3 des grandes compagnies ont été victimes de fausses déclarations.
  • Aux Etats-Unis, le préjudice global est estimé à 100 milliards USD par an.
  • Selon the United States Government Accountability Office (GAO), 1 USD sur 7 est perdu pour fraude dans le secteur de la santé qui arrive en tête pour les fausses déclarations.
  • Pour la seule année 1998, le montant des pertes pour fraude ou réclamations abusives du régime d'assurance santé s'est élevé à près de 12 milliards USD. En 2004, les pertes ont atteint 95 milliards USD.
  • En 2003, la fraude à l'assurance des biens et dommages a coûté 23 milliards USD.
  • En 2004, la fraude à l'assurance automobile s'est chiffrée à 14 milliards USD de fausses réclamations par an.

Fraude à l'assurance : un crime de cols blancs

Selon des sondages d'opinion, la fraude à l'assurance est encore souvent considérée comme une pratique courante et acceptable dans de nombreux milieux qui estiment moins grave de léser une organisation anonyme qu'une personne déterminée.

Mais davantage que l'escroquerie « soft » commise par une victime de sinistre pour laquelle il est « normal » que son assureur paie le prix fort pour compenser le préjudice subi et n'hésite pas, pour cela, à faire de fausses déclarations ou falsifier des documents, c'est l'escroquerie « hard » aux méthodes sophistiquées qui cause le plus grand préjudice à l'industrie.

Le crime organisé a largement investi le secteur, notamment en Amérique du Nord. Facilitées et amplifiées par l'usage généralisé de l'informatique, des opérations à grande échelle, orchestrées par des experts en la matière, sont menées en collusion avec des assurés, des assureurs, des cabinets d'avocats et même des magistrats de haut niveau.

Fraude à l'assurance : une pratique sanctionnée par la loi

fraude assurance sanctionsLa forte augmentation du nombre des tentatives d'escroquerie détectées ces dernières années s'explique par une plus forte efficacité de la lutte antifraude menée par les Etats et les compagnies.

Lorsqu'il est établi par des indices et preuves concordants, le comportement délictueux entraîne son auteur à des poursuites judiciaires devant les tribunaux civils ou les cours pénales.

Les sanctions civiles se traduisent par la nullité du contrat et des primes ainsi que des dommages et intérêts. Les sanctions pénales prévoient des amendes et des peines d'emprisonnement proportionnelles au degré de gravité du délit.

Exemple d'une juridiction antifraude

Devant l'augmentation des cas d'escroquerie à l'assurance constatée à la suite des cyclones de l'année 2004, l'état de Floride a considérablement durci sa juridiction antifraude.

Celle-ci prévoit:

  • 20 000 USD et 5 ans de prison pour une fraude de troisième degré
  • 20 000 à 100 000 USD et 15 ans de prison pour un délit de deuxième degré
  • plus de 100 000 USD et jusqu'à 30 ans de prison pour un délit de premier degré

Fraude à l’assurance : les dispositifs de prévention et de lutte

Pour faire face à cette forme de criminalité élaborée qui s'est développée dans les années 1990, les autorités et l'industrie conjuguent leurs efforts en renforçant les dispositifs techniques et juridiques. L'activité antifraude à l’assurance est menée conjointement par les services de police et de douane de l'Etat et par les unités spéciales d'enquêtes des compagnies.

On va jusqu'à offrir des primes pour obtenir des informations sur les fraudes à l'assurance, à l'instar de la recherche de criminels.

La lutte contre la fraude à l’assurance au niveau des compagnies

Les cas de suspicion de fraude font l'objet d'un examen détaillé par des spécialistes qui procèdent aux enquêtes nécessaires. A cet effet, les compagnies ont développé des instruments techniques statistiques d'indicateurs de fraude permettant de détecter la falsification de documents dans les dossiers des assurés.

Les bases de données informatiques, l'échange d'informations, le renseignement, la formation des enquêteurs, la sensibilisation des consommateurs et de l'opinion font partie de l'arsenal de lutte antifraude. Des agences de détectives spécialisées et des cabinets d'intelligence économique proposent leurs services d'investigations aux compagnies.

La lutte contre la fraude à l’assurance au niveau des Etats

En Europe, l'action des compagnies est renforcée par des agences nationales de lutte contre la fraude.

Aux Etats-Unis, l'ampleur du phénomène a conduit à la mise en œuvre d'une véritable stratégie par la création dans 43 Etats d'un service spécialisé dans la prévention et la répression de la fraude. Le Bureau Fédéral d'Investigation (FBI) et le Bureau de l'Inspection Général (OIG) ont chargé des centaines d'agents spéciaux de la lutte contre la fraude dans le système de l'assurance santé.

En 1993 a été créée la Coalition contre la fraude à l'assurance, une organisation juridique et éducative rassemblant les représentants des consommateurs, des agences gouvernementales et des assureurs. Une institution similaire existe au Canada.

Actualité : Les fraudeurs sont partout

Juin 2005 - Allstate : Mise en cause pour des pratiques présumées irrégulières par le département des assurances de Californie, la compagnie Allstate devra rembourser ses clients à hauteur de 30 millions USD.

Août 2005 - AIG : Le géant américain, premier assureur mondial, a été accusé d'escroquerie par un groupe de 17 réassureurs de différentes nationalités. La fraude porte sur des falsifications de documents en vue de percevoir plus d'argent de la réassurance. Parmi les plaignants figurent Munich Re via sa filiale American Re et Swiss Re dont le préjudice est évalué à 73 millions USD.

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