Piraterie maritime en Afrique : cas du golfe d’Aden en Somalie

En raison de la grave menace qu’elle fait peser sur le commerce mondial, la recrudescence en 2008, des actes de piraterie maritime dans la corne de l’Afrique suscite l’inquiétude de la communauté internationale qui se mobilise pour faire face à ce fléau.

Selon le Bureau Maritime International, le phénomène prend les proportions dramatiques de véritables faits de guerre. On observe, en effet, une intensification de la nature des actes avec une plus grande violence et une extension du périmètre des assauts, une hausse significative du nombre de bâtiments attaqués, du nombre d’otages et du montant des rançons exigées pour leur libération.

piraterie maritime afriqueActes de pirateries entre 2005 et 2010 © Sémhur, CC BY-SA 3.0

Piraterie maritime en Afrique : le cas du golfe d’Aden

Le golfe d’Aden, décrété par les assureurs « zone à risque de guerre » et le littoral de Somalie constituent une voie vitale pour le commerce international, et notamment, l’approvisionnement en hydrocarbures des pays industrialisés. Près de 20 000 navires dont 6 500 tankers, transportant 7 % du pétrole de la planète, empruntent, chaque année cette route qui relie, via le canal de Suez, la Méditerranée, la mer Rouge, l’océan Indien et le Golfe persique.

A la faveur d’une instabilité politique chronique dans cette région de l'Afrique, la forme traditionnelle de piraterie maritime côtière pratiquée par une population de pêcheurs, a évolué, ces dernières années, en une industrie lucrative dotée de grands moyens.

Des capitaux sont investis dans le financement de bâtiments équipés et lourdement armés. Des réseaux se mettent en place pour coordonner les informations sur les cibles et organiser les transactions. Des commandos sont formés dans des camps d’entraînement.

Durant les trois premiers trimestres de l’année 2008, on a dénombré 94 actes de piraterie maritime dans le golfe d’Aden. Selon les derniers chiffres, on compte actuellement 18 bateaux retenus et 330 personnes prises en otage dans la zone et des demandes de rançons en augmentation.

Cette activité criminelle a de sérieuses et multiples répercussions sur le commerce maritime dont une forte augmentation des coûts du transport de marchandises et des primes d’assurance en raison de l’aggravation du risque.

Certaines compagnies maritimes versent des primes de risque supplémentaires à leurs équipages. D’autres doivent se résoudre à payer des rançons pour leur libération. Jusqu’à présent, les montants des rançons étaient de l’ordre de 1 à 2 millions USD. Mais ces montants risquent d’être revus à la hausse compte tenu de la valeur des prises.

Outre un impact négatif sur l’économie des pays riverains, notamment l’Egypte, en cas de désaffection du canal de Suez, la piraterie maritime présente des risques énormes pour l’environnement.

Piraterie maritime en Afrique : le Sirius Star détourné en Somalie

piraterie maritime Sirius StarPropriété de la société pétrolière saoudienne ARAMCO, le supertanker coûte à lui seul 100 millions USD. Sa cargaison de 2 millions de barils de pétrole est évaluée à 120 millions USD. En cas de sinistre, les assureurs estiment à près de 100 millions USD les dédommagements dus à une éventuelle pollution.

Le coût total d’un sinistre pourrait alors s’élever à 300 millions USD.

A la suite du détournement du supertanker saoudien Sirius Star par des pirates somaliens, les pays arabes riverains de la mer Rouge (Egypte, Jordanie, Arabie Saoudite, Soudan, Yémen) se sont réunis le 20 novembre 2008 au Caire pour étudier les moyens de lutte contre la piraterie et l’amélioration des conditions de sécurité du transport maritime.

Piraterie maritime en Afrique : la lutte contre ce fléau et les moyens de prévention

Principes juridiques

En cas d’acte de piraterie caractérisé, le droit international autorise tout état, qu'il soit concerné ou non, à poursuivre et réprimer les actes et les auteurs, à saisir le navire et à appréhender les personnes se trouvant à bord.

Concrètement, les navires militaires ou de police sont autorisés à poursuivre et à intervenir, si c'est possible, afin de garantir la sûreté maritime.

piraterie maritimeLes actes de piraterie créent également une «compétence universelle» des états. Cette « compétence » permet la mise en place d’une coopération concernant l’extradition des coupables vers l'état chargé de les traduire en justice. Des dispositifs juridiques sont mis en place par la communauté internationale pour lutter contre la piraterie maritime :

  • 12 décembre 2002 : Le Code International sur la Sûreté des Navires (ISPS) a été adopté par l'Organisation Maritime Internationale (OMI). Ce texte définit des règles et des conseils pour réduire l'exposition des navires aux risques terroristes.
  • Juillet 2005 : Le Regional Maritime Security Initiative (RMSI) a été adopté par les états limitrophes du détroit de Malacca. Le dispositif a permis la mise en commun et le renforcement des patrouilles pour assurer une surveillance coordonnée de la zone. Grâce à une réduction de moitié du nombre d'incidents, le détroit de Malacca n'est plus classé «route maritime dangereuse» depuis le mois d'octobre 2006.
  • 19 septembre 2008 : La cellule de coordination de l'Union Européenne (EU NAVCO) propose des escortes aux navires vulnérables à la piraterie maritime dans le golfe d'Aden. Une équipe embarquée à bord et une escorte rapprochée par un navire militaire sont les solutions préconisées.
  • 7 octobre 2008 : La résolution 1838 du Conseil de Sécurité de l'ONU permet le déploiement de navires de guerre et de moyens aériens pour lutter contre la piraterie maritime au large de la Somalie. Elle incite à la coordination non seulement des états mais aussi des organisations régionales. Elle demande aux états d'assurer la protection des convois maritimes du Programme Alimentaire Mondial.
  • 10 novembre 2008 : L’opération Atalanta, décidée par l’Union Européenne, a été lancée au large de la Somalie le 8 décembre 2008. Elle a pour but d'assurer la protection des navires du Programme Alimentaire Mondial (PAM), de protéger les navires vulnérables naviguant au large de la Somalie et de dissuader, prévenir et réprimer les actes de piraterie dans les eaux internationales mais également dans les eaux territoriales somaliennes.

Solutions et routes alternatives

Face à l’intensification des dangers liés à la piraterie maritime, les armateurs et compagnies de navigation adoptent diverses mesures dont l’efficacité n’est pas toujours évidente.

Des compagnies organisent des sessions de formation des capitaines et des équipages à la gestion de ces situations de crise. D’autres envisagent de faire appel à des sociétés privées de sécurité. Mais outre son coût (près de 60 000 USD par voyage), le recours à des agents armés à bord des navires peut présenter un risque supplémentaire qui engage la responsabilité de l’armateur.

Enfin, certains professionnels ont opté pour une solution radicale qui consiste à changer l’itinéraire des navires en empruntant la « route du Cap » qui, en contournant l’Afrique, allonge le voyage de 8 à 10 jours.

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