Mécénat : pratique généreuse ou philanthropie stratégique ?

mécéna Stepan Bakalovich At Maecenas' reception room
L’origine du mécénat remonte à l’antiquité romaine. La pratique a connu son âge d’or en Europe à l’époque de la Renaissance où elle était le fait des papes et des princes amateurs et protecteurs des arts.

La tradition s’est perpétuée au sein des cours royales puis avec les états modernes avant que les grandes entreprises ne s’y investissent jusqu’à en devenir des acteurs de premier plan. De nos jours, les banques et les assurances sont connues comme les championnes toutes catégories du soutien à l’art et à la culture.

Définitions de mécénat

Mécène

Le terme Mecenas date de 1526. Il dérive du latin Maecenas, nom d’un ministre de l’empereur Auguste. Depuis, il désigne une personne riche et généreuse qui aide les écrivains et les artistes.

Dans son acception actuelle, le mécénat d’entreprise a pour préoccupation première la promotion de la culture ou des arts, indépendamment d’une stratégie commerciale ou d’une politique marketing de la firme. Il désigne toute action que l’entreprise mène en dehors de son objet direct mais qui vise à promouvoir son image de marque et à améliorer sa notoriété.

La pratique peut, éventuellement, servir comme moyen de communication accessoire pour une entreprise mais ce n’en est pas le but principal. Elle a pour objectif de valoriser l’entreprise comme un acteur ayant une responsabilité sociale, sans portée mercantile. Elle participe à la reconnaissance de l’entreprise en tant qu’entité institutionnelle et sociale.

Used with permission from MicrosoftEn pratique, le mécène fait un don et n’en attend pas de contrepartie financière ou autre. Le mécénat d’entreprise s’associe à un événement sportif, culturel ou humanitaire, sans en attendre un résultat direct financier ou commercial. Il est une action désintéressée et vide de contenu pour la stratégie de la firme. Chargé de fortes connotations historiques et morales, Il est explicitement gratuit.

Le parrainage est l’équivalent français du «patronage» ou «sponsoring». Le concept est ouvertement intéressé et formalisé en tant que tel. C’est, pour le parrain, une opération de communication, une action publicitaire, commerciale sans but philanthropique. Le parrain impose une contrepartie à l’association parrainée. L’opération peut également être intéressante pour les parrains au vu de leurs droits à déduction du résultat imposable.

Les frontières entre les domaines d’application des différents concepts sont floues et variables. Leur usage et leur définition divisent jusqu’aux analystes et chefs d’entreprises. Malgré ces différences qui ont des incidences juridiques et fiscales non négligeables, nombreux sont les praticiens qui ont tendance à confondre les deux notions sous le vocable de «parrainage».

Objectifs du mécénat d’entreprise

En tant que technique de gestion, le mécénat vise la valorisation sociale et le renforcement de la notoriété de l’entreprise par l’élaboration d’une image institutionnelle propre, dotée d’une personnalité indépendante des marques et des produits qu’elle vend.

En s’impliquant dans l’événement, la firme ne limite pas ses activités à ses clients, ses fournisseurs, ses distributeurs, ses consommateurs potentiels.

Le principe du mécénat répond au besoin de l’entreprise de sortir de l’anonymat, de se faire connaître et reconnaître comme un acteur socialement responsable.

Image valorisante

mécénat entreprise Walking man © Sven Teschke, CC BY-SA 3.0

La création d’une image institutionnelle implique la conquête de la confiance et de la crédibilité auprès de tous les interlocuteurs au travers d’une relation forte. Il s’agit d’un investissement au service d’une gestion dynamique de la réputation. Dans le projet de mécénat, la promesse de la communication sociale passe par les faits. Pour l’entreprise, le gain se traduit par un apport d’image positive, un élargissement de son public, un renforcement de son capital de sympathie et de confiance, un investissement pour le recrutement.

Culture d’entreprise

Autre objectif, à caractère interne, le mécénat participe à la cohésion du personnel par une mobilisation de tous les salariés autour de projets culturels ou humanitaires et leur libre adhésion à une action d’intérêt général valorisante. Il procure un motif de fierté et un sentiment d’appartenance qui participent à forger progressivement une culture d’entreprise.

Le mécénat, vecteur privilégié de communication

En externe

A travers l’événement, la communication passe par l’action et non par la fiction. Le mécénat culturel s’adresse au vécu du spectateur en l’invitant à partager la dimension symbolique, esthétique et sociale de l’événement qui, seul, doit être mis en avant.

Contrairement à la publicité traditionnelle, la communication sur l’évènement ne transite pas nécessairement, ni exclusivement par les grands médias, pour délivrer son message. Celui-ci doit être émis sur un mode discret, sans tapage médiatique, sans lien direct avec l’activité commerciale et éviter toute récupération abusive de l’opération de mécénat au profit de l’entreprise.

En interne

mécénat définitionLe mécénat artistique suppose une action pédagogique convaincante en direction du personnel. Son but est de garantir la participation des salariés au projet artistique, souvent considéré comme élitiste. Pour lever les réticences du personnel et de ses représentants syndicaux, les entreprises sont de plus en plus amenées à intégrer des causes humanitaires, plus fédératives, à la promotion d’une œuvre ou d’une manifestation artistique. Elles ont également recours à la formule du mécénat-associé sur la base d’initiatives du personnel.

Limites et évolution du mécénat

Au tournant des années 1990, le contexte de crise économique mondiale et d’augmentation du chômage, principalement en Europe, a eu des conséquences négatives sur la perception du mécénat. Aussi bien dans l’opinion qu’au sein des entreprises, des soupçons et des critiques sont apparus, reprochant au mécénat d’art son élitisme, son archaïsme, son manque d’efficacité opérationnelle et de contenu social concret.

Le débat contradictoire s’est étendu à des questionnements sur la fonction même de l’entreprise. Doit-elle limiter son action à l’innovation technique et aux seuls objectifs économiques du manager et renoncer définitivement au domaine de l’art et de sa contemplation passive ?

Mécénat assuranceSi, depuis toujours, les interrogations sur son utilité sociale reviennent de façon récurrente, le mécénat demeure une pratique qui relève de la culture même d’une société. Elle est particulièrement ancrée aux États-unis, à travers les fondations et les actions philanthropiques de personnalités célèbres. Pour la seule année 2002, par exemple, le montant du mécénat privé aux USA a atteint 10,483 milliards USD, soit 2,1% du PIB alors qu’en France, ce chiffre ne dépassait pas 359 millions USD, soit 0,09% du PIB. Ce chiffre a atteint 1,184 milliard USD en 2005.

En Suisse, les entreprises mécènes soutiennent l’art pour un montant d’environ 243 millions USD par année. En Irlande, le mécénat d'art a atteint un montant de 112 millions USD en 2005.

Le mécénat et l'assurance

Pour les assurances, en particulier, l’engagement dans des actions de mécénat culturel et patrimonial constitue un prolongement naturel du métier d’assureur des œuvres d’art. Il s’inscrit dans une logique de groupe et dans une stratégie de communication à long terme. De nombreuses sociétés d’assurance constituent des fondations dédiées au mécénat d’art qui développent leur activité à l‘échelle mondiale.

Dans un tel cadre, le mécénat se concrétise, également, par une contribution financière à des programmes de recherche et de formation dans les techniques de restauration et de préservation du patrimoine artistique. Il constitue, enfin, un moyen de sensibiliser le grand public aux œuvres d’art en facilitant l’accès des salariés de l’entreprise aux musées et aux expositions.

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