Micro-assurance : principe de base, produits proposés et risques couverts

Introduite, à partir des années 1980 dans les pays en voie de développement, la micro-assurance est un produit financier spécifiquement destiné aux populations à faible revenu. Elle offre un moyen complémentaire pour garantir les activités économiques et sécuriser les revenus des individus et des ménages les plus vulnérables.

micro assuranceInvestie, initialement par les Institutions de Micro Finance (IMF) et les orga- nisations informelles, cette nouvelle «niche» suscite un intérêt croissant chez les acteurs institutionnels tels que bailleurs de fonds, gouvernements et compagnies d’assurance. Selon une opinion de plus en plus répandue, la micro-assurance peut servir d’instrument potentiellement efficace dans la lutte contre la pauvreté dans des régions où se concentrent 80% de la population mondiale.

Contexte d'apparition de la micro assurance

La micro assurance est apparue dans un contexte économique et social marqué par le désengagement des états des services de santé publique et de protection sociale et par l’émergence de la société civile à travers des mouvements associatifs et des ONG impliquées dans les actions de développement durable.

Dans la plupart des pays, les systèmes de micro assurance ont été développés par des organisations informelles ou des IMF sur le modèle de la Grameen Bank, pionnier du micro crédit au Bangladesh.

D’une portée à la fois sociale et économique, l’objectif d’un tel mécanisme est de réduire l’exposition au risque des ménages les plus vulnérables en leur proposant une couverture compatible avec leurs capacités financières.

La Grameen Bank

Créée officiellement en 1983 par Muhammad Yunus au Bangladesh, la Grameen Bank ("grameen" signifie village) est une banque spécialisée dans le micro-crédit. Elle dispose de près de 1400 succursales et travaille dans plus de 50 000 villages. Depuis sa création, elle a déboursé 4,69 milliards USD de prêts et affiche des taux de remboursement de près de 99 %.

L'organisation et son fondateur ont été récompensés du Prix Nobel de la paix en 2006

Principe de base de la micro assurance

Tout comme les systèmes d’assurance classique, la micro-assurance fonctionne sur le principe de la mutualisation du risque entre un grand nombre d’individus. Cette mutualisation permet une protection pour tout sinistre de faible fréquence et de forte intensité. Le service est fourni en échange du versement régulier de primes d’un montant proportionnel à la probabilité et au coût des risques concernés.

Population cible

Crédit photo: US Gov. / BanyanTreeLa micro-assurance peut bénéficier à un très large éventail allant des populations en dessous des seuils de pauvreté aux classes moyennes basses ou émergentes qui restent vulnérables en l’absence de couverture assurantielle ou de protection sociale.

Les clients peuvent être des individus, des ménages, des collectivités du monde rural, périurbain ou urbain travaillant, souvent, dans l’économie informelle ou la micro entreprise.

Selon les régions, les formes d’organisation sociale et les cultures, les cibles types de la micro assurance sont:

  • Les clients des IMF disposant déjà d’un crédit ou d’un compte d’épargne
  • Les membres des mutuelles sant&eacute
  • Les associations de femmes
  • Les coopératives agricoles
  • Les syndicats et organisations sociales et professionnelles
  • Les fonds funéraires informels
  • Les clients de points de vente au détail
  • Les groupes d’entraide sociale

Acteurs de la micro-assurance

Les acteurs peuvent être de statuts divers: assureurs classiques, mutuelles, IMF, gouvernements, organismes associatifs ou professionnels, prestataires de services de santé.

Selon les différents modèles, les acteurs peuvent opérer :

En tant qu’assureur direct fournissant un service intégral. Dans un tel cas, le prestataire a une maîtrise totale de toute la chaîne de production, depuis la conception de l’offre jusqu’à sa distribution. Seules de puissantes IMF, parvenues à maturité, ont pu développer une expertise technique leur permettant d’assurer ce rôle (exemple SEWA, Tata en Inde, Delta Life au Bengladesh, Sky au Cambodge).

En tant que partenaire-agent. Le prestataire intervient en qualité d’agent distributeur, intermédiaire d’une compagnie d’assurance. La conception et la gestion du produit sont réalisées par l’assureur, mais le marketing et la distribution du produit sont assurés par l’agent La formule implique une répartition des tâches. La compagnie d’assurance alimente ses réserves financières, fixe les primes, supervise les demandes d’indemnisation et garantit le respect des obligations légales. De son côté, l’agent se charge du transfert rationnel du risque, des ressources et du partage des connaissances entre secteurs formel et informel. Exemples de partenariats:

  • AIG: Ouganda, Malawi, Tanzanie
  • Madison Insurance: Zambie
  • Allianz: Indonésie, Inde
  • Banamex et Seguros Azteca: Mexique
  • Aviva: Inde

En tant que mutuelle ou communauté: les assurés sont eux-mêmes à la fois propriétaires et gestionnaires du système. L’offre porte généralement sur des assurances crédit, vie, épargne et santé. Dans le cas spécifique de l’assurance santé, le fournisseur offre également une prestation de services partielle ou complète de soins et garantit la qualité de la prestation et la fidélisation de la clientèle.

Conditions de mise en oeuvre de la micro-assurance

Crédit photo: US Gov.Les prérequis fondamentaux sont identiques à ceux régissant l’assurance classique, à savoir: réglementation favorable, compétences techniques et institutionnelles.

Le principal défi de la micro-assurance étant la faiblesse et l’irrégularité des revenus des populations, la mise en oeuvre de dispositifs viables et efficaces de micro-assurance suppose qu’un certain nombre de conditions particulières soient réunies :

  • une fine connaissance du terrain et une réelle proximité avec les populations.
  • une définition précise des produits en fonction de la demande.
  • la conception de produits simples, compréhensibles et attractifs
  • une tarification et des conditions de recouvrement des primes adaptées aux capacités de paiement des assurés.
  • des circuits de distribution de proximité, accessibles et flexibles qui s’inscrivent dans le tissu social.
  • un mode et des supports de communication adaptés au contexte local et au niveau d’alphabétisation des populations.
  • la mise en place de procédures d’assistance pour les déclarations de sinistres et l’accélération des délais de règlement des réclamations.
  • des systèmes et procédures de contrôle pour éviter l’anti-sélection, le risque moral et le risque de fraude à l'assurance.

Micro-assurance : les types de risques couverts

Compte tenu de son champ d’intervention, la micro-assurance est plus appropriée pour la couverture des chocs microéconomiques, à savoir des évènements qui créent un besoin imprévu et urgent d’argent supplémentaire à celui dont dispose le ménage ou l’individu.

Il peut s’agir d’imprévus personnels tels que le décès du chef de famille, des accidents, blessures ou maladies provoquant une invalidité partielle ou totale.

D’autres risques sont liés aux biens mobiliers et immobiliers : habitation, outils de production.

Les produits de micro-assurance

Les produits les plus courants portent sur la santé et l’assurance vie, mais l’offre est de plus en plus diversifiée.

  • Assurance vie Constituant un produit phare du système, l’assurance vie est souvent souscrite dans le cadre de prêts accordés par les IMF. Elle combine une couverture d’assurance vie (en cas de décès) et un produit d’épargne (en cas de vie) et peut être assortie de plusieurs garanties complémentaires (emprunt, frais d’obsèques).

Assurance obsèques

En Afrique sub saharienne, les frais funéraires assumés par les familles occasionnent des dépenses supérieures aux revenus du foyer. Les garanties obsèques constituent un marché important en Afrique du Sud où on compte 10 millions d’adultes qui disposent d’une telle couverture.

  • Assurance santé : Les problèmes de santé étant des vecteurs majeurs de grande pauvreté, l’assurance maladie est la couverture la plus demandée par les populations. Elle fournit une couverture contre la maladie et les accidents ainsi que des prestations de prévention (vaccination, contraception).
  • Assurance des biens :  Elle offre la garantie incendie et risques divers des biens particuliers, professionnels ou agricoles en cas de pertes ou dommages.
  • Assurance agricole : En raison du rôle vital de l’activité agricole pour les populations rurales, le produit est appelé à connaître un grand essor à l’avenir. Plusieurs institutions internationales dont la Banque Mondiale et l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) développent, en partenariat avec des compagnies d’assurance, des projets pilotes d’assurance des risques climatiques en Afrique, Amérique du Sud, Europe, Asie. Pour ce secteur d’activités, d’autres produits sont disponibles, tels que l’assurance récoltes ou mortalité du bétail.

Problématique et défis de la micro-assurance

Son extension progressive à travers la planète et son adoption comme réponse alternative aux besoins de protection des populations les plus vulnérables font, désormais, du secteur de la micro assurance, un acteur à part entière dans le paysage financier.

Le secteur qui se structure et fait montre d’innovation, dispose d’un fort potentiel de croissance et attire de nouveaux acteurs parmi les compagnies d’assurance classiques. Certaines d’entre elles interviennent, en partenariat avec des IMF locales dans les pays en développement, d’autres inaugurent des programmes similaires destinés à des micro entrepreneurs en Europe même.

Toutefois, et en dépit de succès avérés, l’absence de bilans et de données exhaustifs ne permet pas de mesurer avec précision l’efficacité et la rentabilité des entreprises et systèmes de micro assurance.

On constate, en effet, que dans la plupart des pays du sud, les codes d’assurance ont été copiés sur ceux des pays industrialisés alors que la situation y est radicalement différente en regard du niveau de développement et du taux de pénétration assurantielle.

Les dispositions pour la création de sociétés d’assurance sont financièrement contraignantes et freinent le développement de la micro-assurance. Les réglementations régissant la distribution sont défaillantes ou inappropriées, à l’exemple du Code CIMA en Afrique francophone qui n’accorde pas d’agrément officiel aux institutions du secteur informel pour mettre en place des systèmes de micro-assurance.

Le cadre législatif restrictif, l’absence de contrôle et de soutien des états, la taille modeste des institutions et le manque d’accès au filet de protection de la réassurance créent une situation qui fragilise les programmes et la viabilité de la micro-assurance.

Selon des bailleurs de fonds actifs dans le secteur (Agence de coopération allemande GTZ) ou des organismes professionnels (Association internationale des contrôleurs d’assurance), la promotion et la pérennité de la micro- assurance relève, en premier lieu, de la décision des gouvernements, par l’adoption de cadres législatif et réglementaire spécifiques au secteur et de mesures d’accompagnement sous forme d’incitations fiscales.

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