Le marché de l'assurance maritime dans un cycle baissier

Malgré les événements majeurs enregistrés ces dernières années, les primes d'assurance transport maritime n’ont pas connu d’augmentation. Cette situation de marché «soft» perdure encore.
assurance maritime

La catastrophe de Tianjin de 2015 aurait pu constituer un tournant significatif du marché. Après cet événement, l’ensemble des professionnels espérait une augmentation sensible des cotisations. Or, la majeure partie des armateurs a renouvelé ses polices d’assurance à la baisse ou sur les mêmes bases que l’année précédente.

Le renouvellement des traités d'assurance maritime au 1er janvier 2016 a été marqué, encore une fois, par une baisse des tarifs comprise entre 5 et 20% par rapport à 2015.

Ce cycle baissier s’explique en grande partie par la surcapacité du marché de l’assurance et par l’entrée de nouveaux acteurs qui contribuent à maintenir les tarifs à des niveaux historiquement bas.

Enfin, le ralentissement économique des pays émergents et en particulier celui de la Chine risque, une fois de plus, de reporter à plus tard, la remontée des taux.

Assurance maritime : un marché en stagnation

Selon les chiffres communiqués par l’IUMI, le montant total des primes d’assurance transport maritime pour la seule flotte de commerce est en recul depuis 2012. Il s’élève à 32,6 milliards USD en 2014, en baisse de 3,2% par rapport à 2013 et de 4,9% par rapport à 2012. Le marché stagne depuis ces trois dernières années, et ce, malgré l’augmentation exponentielle du nombre de navires, du tonnage et du montant des capitaux assurés.

Evolution des primes globales transport maritime : période 2008-2014

Assurance maritime - primes globales Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

Comme le souligne le graphe ci-dessus, la baisse des primes d’assurance transport maritime constatée depuis l’année 2012 n’a été freinée ni par l’augmentation exponentielle du volume des marchandises transportées, ni par l’accroissement continu du nombre de navires.

Primes par région 2014

A elle seule, l’Europe totalise, en 2014, plus de la moitié des encaissements (52,6%). Au cours de la même année, les régions Asie-Pacifique, Amérique Latine et Amérique du Nord détiennent respectivement 25%, 9,8% et 6,4% de parts de marché. Le Moyen-Orient et l’Afrique restent en retrait avec 3,1% et 3% des primes totalisées.

Assurance maritime - Primes par région Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

Primes par branche 2014

Les primes collectées au titre des assurances facultés maritimes générées par la flotte de commerce s’élèvent à 16,95 milliards USD en 2014, en baisse de 7,1% par rapport à 2013. L’Europe accapare 43% de ce montant. La région Asie-Pacifique arrive en seconde position avec 28,9% des primes souscrites.

L’aliment corps de navires totalise 7,6 milliards USD de primes en 2014. Cette branche enregistre une 19ème baisse successive avec un recul des encaissements de 5,8% par rapport à 2013.

Les marchés énergie et responsabilité civile se chiffrent respectivement à 5,7 et 2,35 milliards USD.

Assurance maritime - Primes par branche Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

Assurance maritime : La sinistralité

Le niveau de sécurité du transport maritime est en constante amélioration depuis le début du 20ème siècle. La sinistralité a nettement baissé, et ce, malgré l’accroissement du trafic et de la flotte maritime. Le marché est ainsi passé, en un siècle, de 1 navire sinistré sur 100 en 1912, à 1 sur 984 en 2012(1).

Toujours selon le rapport d’Allianz «Safety and shipping review 2015»(2), la tendance à la baisse des sinistres s’est confirmée. Seules 75 pertes totales ont été enregistrées dans le monde en 2014, ce qui en fait l’année la plus sûre de la dernière décennie. Le nombre des sinistres déclarés en 2014 (127) est en recul de 32% par rapport à l’année précédente. Il est également inférieur à la moyenne des dix dernières années.

Bien que la baisse des pertes de navires soit un signe encourageant, l’augmentation des valeurs assurées et la recrudescence des catastrophes majeures à l’instar de celles du Costa Concordia en 2012, de Sandy en 2012 et de Tianjin en 2015, suscitent de sérieuses interrogations quant à l’avenir du marché.

(1)Atlas Magazine «Sécurité et transport maritime»
(2)Source: agcs.allianz.com/assets/PDFs/Reports/Shipping-Review-2015.pdf

Assurance maritime : évolution du rapport sinistres à primes

Après la survenance du cyclone Sandy en 2012, le rapport sinistres à primes de la branche facultés maritimes dépasse largement les 70%. Bien que moins impactées, les années 2013 et 2014 enregistrent une sinistralité en léger recul par rapport à celle de 2012.

Selon l’IUMI, les performances enregistrées en 2014, considérée comme une année clémente en matière de catastrophes maritimes, sont affectées par la catastrophe engendrée par les explosions de Tianjin.

Assurance transport facultés maritimes: ratios sinistres à primes pour la période 1996-2014

Depuis l’année 2007, le ratio sinistres à primes de l’assurance transport facultés maritimes a excédé les 70% (sauf en 2009).

Assurance facultés maritimes - Ratio sinistres à primes Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

Assurance corps de navire : ratios sinistres à primes pour la période 1996-2014

Assurance corps de navire - Ratio sinistres à primes Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

Fréquence de la sinistralité : période 1998-2015

Assurance maritime - Fréquence sinistralité Source: Union Internationale d’Assurance Maritime (IUMI)

La faible sinistralité enregistrée par le marché transport maritime depuis 1998 a permis d’absorber quelques événements de grande ampleur comme l’échouement du Costa Concordia en Italie qui constitue, à ce jour, le naufrage le plus coûteux de l’histoire. Allianz Global Corporate & Specialty(1) avance un montant de 2 milliards USD de pertes à la charge des assureurs. Les coûts du retrait de l’épave ont largement dépassé la valeur de la coque.

Autre événement marquant des dernières années, l’ouragan Sandy qui a ravagé la côte Est des Etats-Unis en octobre 2012, a provoqué des dégâts considérables dont une partie supportée par les assureurs transport maritime. Ces derniers ont déboursé un montant compris entre 2,5 et 3,5 milliards USD(2), engloutissant ainsi la totalité des primes du marché américain de 2012.

Outre ces deux catastrophes, le porte-conteneurs japonais «MOL Comfort», d’une capacité de 8110 EVP, qui s’est brisé en deux dans l’océan indien en juin 2013, constitue une autre perte totale particulièrement importante. A ce jour, l’indemnisation des pertes corps et facultés, avoisine les 500 millions USD.

(1) Source: Allianz Global Corporate&Speciality, Safety and shipping review 2015
(2) Rapport mai 2013, Zurich Global Corporate in North America
aimu.org/aimupapers/CBMUPresentationonSANDYbySeanDaltonslides.pdf

Assurance maritime : un potentiel sous-exploité

La voie maritime reste, de très loin, le moyen de transport le plus usité pour l’acheminement des marchandises ; 90% du commerce mondial s’effectuent selon ce mode. Selon Swiss Re Economics Research & Consulting, le commerce international continuera à croître plus vite que le PIB mondial au cours des dix prochaines années. Les assureurs devraient logiquement profiter de cette situation.

Or, la réalité risque d’être bien différente car le transport maritime génère peu de profits pour les assureurs. La demande mondiale d’assurance reste déphasée par rapport à l’intensification continue du commerce mondial. D’où un énorme gap entre capacité et primes avec la persistance d’un manque à gagner significatif pour les assureurs.

Réglementation de l’assurance maritime

Malgré l’aspect international du transport maritime, ce secteur souffre du manque d’harmonisation des législations entre pays. Les lois, clauses, polices d’assurance et pratiques diffèrent d’une région à une autre.

L’assurance maritime abrite des opérations intermodales de transport ainsi que des activités hors transport. Les assurances maritimes comprennent quatre principaux types de couverture:

  • L’assurance «corps» de navire: sert à indemniser les pertes et dommages matériels subis par les navires assurés.
  • L’assurance «facultés»: couvre les dommages causés aux marchandises transportées par voie maritime. Sont également garantis les dommages subis par les marchandises au cours des trajets complémentaires ou préliminaires (par voie terrestre, ferrée, fluviale,…) y compris durant les phases de chargement, de déchargement, de transbordement et de transit.
  • L’assurance de responsabilité civile et contractuelle du propriétaire du navire, du transporteur maritime et fluvial et de l’affréteur. Ces assurances sont très souvent délivrées par les P & I Clubs(1).
  • L’assurance énergie offshore des risques, dommages et responsabilité des opérations d’exploration, construction, forage et production d’énergie en mer (pétrole et gaz).
(1) Atlas Magazine «P&I Clubs : La responsabilité des armateurs»
4
Votre notation : Aucun (1 vote)
Programme de publicité          Conditions d'utilisation          Copyright          Liens utiles          Réseaux sociaux          Crédits