La réassurance face aux risques émergents

L’apparition de nouveaux risques fait émerger de nouveaux besoins de protection et une nouvelle approche de la matière assurable. Pour faire face à cette situation complexe, les acteurs du marché doivent reconsidérer leurs approches traditionnelles des risques pour mieux évaluer, analyser, traiter et gérer ces aléas. Ils doivent également travailler avec les pouvoirs publics qui détiennent une partie des solutions aux problèmes posés par ces risques de type nouveau.
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L’économie digitale et l’invasion du big data bouleversent la connaissance et l’analyse des risques émergents face auxquelles les modèles traditionnels sont complètement dépassés.
De plus, l’accélération du changement climatique et l’accroissement de la longévité des populations engendrent des évolutions sociologiques et économiques lourdes tout en créant également de nouveaux besoins.

Le peu d’informations disponibles concernant ces nouveaux dangers et ces nouvelles expositions à fort potentiel de perte obligent les assureurs à repenser leur métier. De nos jours, l’assurance ne consiste plus uniquement à indemniser le client mais également à analyser avec lui le risque, son partage entre client, assureur, réassureur et sa prévention.

Difficulté des réassureurs à identifier les risques émergents

Les compagnies d’assurance et de réassurance se heurtent à de grandes difficultés dans leur approche des risques émergents. La première de ces difficultés est de cerner ces risques qui ne sont pas faciles à identifier car ils naissent et évoluent au rythme de contextes sociaux et technologiques en rapide accélération.

Même identifiés, les nouveaux risques ont du mal à être correctement cernés par les assureurs. Les garanties qui y sont attachées et les capitaux alloués pour y faire face font souvent l’objet de tâtonnements.

Tout dans ces risques est difficile à identifier:

  • leur nature exacte,
  • la forme sous laquelle ils apparaissent,
  • leur durée,
  • leur intensité,
  • la catégorie du risque à laquelle ils se rattachent, etc.

Les assureurs et les réassureurs face à la quantification des risques émergents

Les compagnies d’assurance et de réassurance rencontrent un réel problème de quantification des risques émergents. Les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis ont pris de court tous les assureurs qui, même dans leurs scénarios les plus pessimistes ne pouvaient prévoir un sinistre d’une telle ampleur, cumulant un nombre si élevé de branches d’assurance.
C’est à partir de cet événement que la profession a pris conscience de son exposition aux risques extrêmes.

La mondialisation crée elle-même de nouveaux risques extrêmes comme par exemple la rupture de la chaîne d’approvisionnement. Ce nouveau risque émergent associé à la concentration croissante des richesses et des activités humaines peut générer des sinistres hors normes comme ce fut le cas en août 2015 à Tianjin, en Chine.

En fait, les risques émergents présentent des spécificités qui les placent souvent à la frontière de l’inassurabilité. Avec l’apparition de la cybercriminalité, certains risques peuvent être, même considérés comme systémiques.

La réassurance comme outil de résilience des risques émergents

En assurance, la résilience permet d’assumer la continuité de l’activité après un sinistre majeur. C’est la capacité à un retour rapide à la normale en cas de catastrophe d’une ampleur exceptionnelle. En 2011, l’économie japonaise a fait preuve de résilience après l’explosion du réacteur nucléaire de Fukushima et du tsunami qui a suivi.

A cette première notion de résilience s’ajoute une seconde qui est la cyber-résilience. C’est cette dernière que craignent les assureurs par le risque de chaos qu’elle peut engendrer. «Le bug de l’an 2000» a constitué, en son temps, un exemple de cyber-risque à caractère systémique pouvant bloquer des pays entiers.

Vulnérabilité et mitigation des risques:

Vulnérabilité et mitigation sont deux notions proches qui découlent du principe de protection et de réduction des risques.

Depuis de nombreuses années, les assureurs et les réassureurs ont investi dans la prévention des risques.

Les premières actions en la matière ont été introduites, il y a quelques décennies, dans les domaines de la prévention routière et de l’incendie. Depuis, les assureurs investissent dans toutes les branches où, en relation avec les clients, ils introduisent des mesures pour atténuer la vulnérabilité des risques.

En matière de catastrophes naturelles, la profession est généralement associée aux Etats et aux collectivités locales pour diminuer la vulnérabilité des risques. L’objet est de réduire la probabilité de survenance d’un risque catastrophe ou d’en réduire l’intensité.

La mitigation consiste à réduire et atténuer les dommages causés par la survenance d’un sinistre.
La réassurance représente un outil de mitigation des risques. Elle permet de réduire la vulnérabilité des assureurs face aux gros risques.

La réassurance du risque de longévité

C’est à partir de modèles mathématiques et de tables prospectives de mortalité que les assureurs modélisent le risque de longévité.
Ce risque représente un casse-tête permanent pour les assureurs aussi bien vie que non vie. Sa gestion qui s’étale sur de longues années s’avère délicate.

C’est pour ces raisons que les assureurs le transfèrent vers les réassureurs qui, eux-mêmes, le mutualisent au sein d’une population de risques plus vaste en le plaçant souvent auprès des marchés financiers. La réassurance alternative est de plus en plus sollicitée pour absorber ce type de risque.

Les besoins de capacité réassurance des risques émergents

Pour souscrire les risques émergents aux contours flous et à potentiel de perte élevé, les assureurs ont besoin de la capacité fournie par les réassureurs. Le marché des Bermudes, qui a émergé après le sinistre du World Trade Center de 2001, apporte une solution à ces besoins de capacité de risques nouveaux, c’est-à-dire des risques à faible fréquence et à forte intensité comme les cyclones, tremblements de terre, terrorisme, etc.

Le marché de Londres constitue un marché traditionnel de placement pour de tels risques, en particulier pour les risques de guerre, attentats, émeutes et mouvements populaires, etc.
On note enfin, l’arrivée récente de capitaux nouveaux drainés par la réassurance alternative. Cette dernière représente 18% de la capacité mondiale de réassurance en 2014.

Rôle de l’Etat dans la couverture des risques émergents

De nature traditionnelle ou alternative, la réassurance ne peut, à elle seule, fournir toutes les solutions aux besoins de couverture des assureurs en matière de risques émergents.

L’Etat joue un rôle majeur dans la résolution de ce problème. Il est le seul habilité à légiférer et à imposer un cadre réglementaire: souscription obligatoire de risques de nature catastrophique, cybercriminalité, terrorisme, changement climatique, etc.

Un partenariat public-privé demeure la solution la plus réaliste pour couvrir efficacement les nouveaux risques et satisfaire aussi bien les clients, les assureurs, réassureurs et l’ensemble de la communauté.

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